Ferro-Lyon

Métros, trams, trains, funiculaires lyonnais…

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Cohérence…

Publié le 15-06-2008 à 23h05

On dit qu’une ville réussie, c’est la rencontre d’une planification urbaine de qualité, avec des réseaux de transport efficaces. Cette articulation est en effet indispensable pour que les habitants puissent facilement se déplacer de leur lieu de résidence à leurs lieux de travail, d’étude, de shopping ou de loisir. À Lyon, l’idée de lien cohérent entre la planification urbaine et les transports semble malheureusement depuis longtemps morte. Si l’on regarde les développements de nouveaux quartiers de la commune de Lyon depuis 50 ans, on ne peut qu’être frappé par leur l’absence de planification dans le même temps de leurs liaisons avec les secteurs importants de la ville qui existaient déjà.

Ainsi, le quartier de la Part-Dieu, dont l’ambition urbaine majeure était affichée dès le début des années 1960 n’a pas été relié directement au centre-ville par le réseau de métro alors en gestation. Le réseau de métro a été conçu en cohérence avec la logique urbaine passée, que le nouveau quartier est venu bouleverser. Ainsi alors même que le réseau ouvrait, son incohérence par rapport à l’évolution de la ville était évidente. Cette erreur, jamais corrigée, a crée à Lyon deux centre-ville disjoints et fonctionnant de manière autonome. Cette dichotomie crée cependant de forts besoins de déplacement entre les deux. Cette demande n’est actuellement résolue par le réseau de transport en commun que par des bricolages peu efficaces, avec au choix l’utilisation de deux lignes de métro, ou l’emprunt de lignes de bus dont la régularité de passage n’est pas le point fort.

On aurait pu se dire que cet exemple désastreux d’aménagement d’un centre structurant comme un isolat, sans lien cohérent avec le centre-ville que l’agglomération n’en fini pas de subir aurait servi de leçon. Que nenni ! Les années passent et les projets urbains naissent et se concrétisent. Le schéma du réseau de transport reste lui à la traîne, et son schéma de développement est plutôt bricolé à la marge que revu en profondeur. Ce qui conduit à des prolongements de lignes selon des tracés peu pertinents, mais qui en se rebranchant au plus court sur le réseau préexistant minimise les coûts d’investissement. Cela se traduit aussi plus insidieusement par une perte progressive d’attractivité du centre historique de la Presqu’île, finalement peu relié aux nouveaux pôles de développement.

On voit donc naître et se structurer le quartier de Gerland, certes desservi par le métro, mais une nouvelle fois sans desserte directe avec la Presqu’île. Gageons d’ailleurs que sa desserte par le métro est plus due à la préexistence du stade, qu’à un quelconque esprit éclairé d’anticipation de l’urbanisation et de la reconversion des friches industrielles.

Le quartier de l’Industrie, à Vaise, lui aussi connaît un développement remarquable. Cependant, si l’arrivée du métro D est bien planifiée à terme, nul ne se risque à avancer une date quelconque.

Pire, le plus gros projet en cours, celui dit de la Confluence, sur la presqu’île en aval de la gare de Perrache tombe dans le même errements, alors qu’il est isolé du reste de la ville par le fleuve, la rivière, les voies ferrées, et l’autoroute. Il a été estimé bien suffisant de desservir ce secteur par un prolongement de la ligne de tramway T1, alors qu’initialement, il aurait dû être arrimé au reste de la Presqu’île par la ligne A du métro. Certes, le coût des travaux avait de quoi faire reculer, cependant une fois de plus, on conçoit un quartier non comme le morceau d’un tout, mais comme une pièce isolée, autonome, que l’on réussira bien à relier à quelque chose (mais quoi ?) par un bricolage quelconque. Ainsi, du confluent au centre « historique » il faut faire une correspondance, alors que ce sont des quartiers quasiment adjacents. En admettant que le prolongement de la ligne A du métro se soit avérée trop coûteuse à faire, il aurait certainement été raisonnable d’envisager la création d’une ligne de tramway entre le secteur d’Hôtel de Ville (voir la Croix-Rousse) et ce nouveau quartier.

Quels transports urbains entre le centre historique de Lyon et les nouveaux quartiers ? (Fond: Google)

Cependant, le plus grave reste à venir, car cette politique de séparation des réflexions sur l’urbanisation et les transports, déjà à l’œuvre en banlieue depuis 40 ans, s’étend et s’aggrave. Ainsi sur le projet de nouveau stade à Décines, on peut s’extasier sur des images virtuelles du bâtiment et de ses abords, en revanche, dès qu’on aborde la question du fonctionnement urbain de la chose, et des besoins de transport qui en découlent, c’est largement plus flou, et là, ce ne sont plus des images de synthèse des bouchons ou des rames de la ligne T3 surchargée qui sont montrées, mais des idées vagues incohérentes, des schémas crayonnés sur un coin de table. Car faut-il le rappeler, ce stade, aussi grand soit-il ne peut justifier à lui seul des infrastructures lourdes de desserte capables d’absorber les pointes de trafic qu’il génèrera. Une ligne de métro, par exemple, n’a de sens que si un grand nombre de personnes l’emprunte chaque jour, et non si elle est fréquentée uniquement un soir par semaine. Pour justifier et amortir ces infrastructures, c’est donc bien une ville nouvelle qu’il faudra construire à côté du stade, avec au moins 30 à 50 000 habitants supplémentaires et certainement au minimum 10 à 20 000 emplois.

Bref, il est temps pour les autorités lyonnaises de réviser globalement à la fois les projets d’aménagement urbain dans et autour de Lyon, mais surtout de les coordonner avec les projets d’évolution des réseaux de transport urbain pour structurer la ville. Si cette mise à plat n’est pas faite, c’est à terme toute l’attractivité de l’agglomération qui va en pâtir. Ce qui aura des conséquences économiques particulièrement néfastes…

Note : Exceptionnellement, il n’y aura pas d’édito en juillet et en août. Prochain édito début septembre.