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Chère LESLYS ?

Publié le 08-02-2009 à 11h57 (mis à jour le 19-02-2009 à 10h30.)

Alors que la ligne de tramway express Leslys entre la Part-Dieu (Villette) et l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry est en train d’être réalisée, il est intéressant d’essayer d’estimer le coût de l’opération pour la collectivité.

image promotion LESLYS (doc. CG69)

La réalisation de LESLYS est assurée pour le compte du conseil général du Rhône par un contrat de concession confiée à la société Rhônexpress SAS. Le concessionnaire a donc à sa charge la construction, l’entretien et la gestion de l’infrastructure pour une durée de 30 ans. Le coût de l’infrastructure à construire et du matériel roulant est estimé à 110 millions d’euros. Le financement se répartira de la façon suivante :

  • 17,7 millions d’euros de fond propres apportés par les entreprises actionnaires de Rhônexpress SAS ;
  • 31,35 millions d’euros de subvention versés à la construction par le département du Rhône ;
  • 62 millions d’emprunt bancaire à la charge de Rhônexpress SAS.

Jusque là, tout est simple et si on s’arrête là, la collectivité publique financerait moins de 1/3 du coût de construction… Sauf que plusieurs subventions viennent se surajouter.

Tout d’abord, il y a les travaux que le SyTRAL a programmé sur la ligne T3 pour l’adapter au passage de LESLYS (signalisation, motorisation d’aiguilles…), soit 8 millions. Ces travaux sont prévus par la convention signée le 29 avril 2004 entre le conseil général du Rhône et le SyTRAL qui prévoit que le second en avancera le montant pour un maximum de… 8 millions d’euros, que le premier lui remboursera ensuite. Dans le cadre de cette même convention, le SyTRAL doit contractuellement laisser passer sur la ligne T3, 4 trains LESLYS par heure et par sens. La convention fixe aussi la capacité globale de la ligne à 12 trains par heure et par sens avec la double exploitation T3/LESLYS (une rame T3 toutes les 7 minutes 30, et une LESLYS toutes les 15 minutes) on voit que LESLYS occupe un tiers de la capacité de la ligne entre la Part-Dieu (Villette) et Meyzieu ZI. La valeur de cette occupation, ainsi que de l’usure de la voie qui en découle est difficile à estimer, mais représente de toutes façon au minimum un quart des coûts de construction et d’entretien. Or si la convention parle bien de la répartition des coûts d’entretien, elle laisse à la seule charge du SyTRAL les coûts de premier établissement.

Le conseil général, pour se défendre, peut dire qu’il subventionne le SyTRAL par le biais des fonds de concours… C’est exact, mais cela représente aussi une subvention indirecte à la société Rhônexpress SAS.

De plus, le conseil général, dans le contrat de concession a garanti une subvention annuelle de 3,5 millions d’euros, indexé au taux de 2% par an au titre du remboursement du prêt contracté par Rhônexpress pour la construction de la ligne. Soit, par cumul sur les 30 ans que dure la concession, la somme de 142 millions d’euros.

Bref, si on résume, LESLYS va absorber en financement des collectivités locales sur la durée de sa concession :

  • 31,35 millions d’euros venant du conseil général lors de la construction ;
  • 142 millions d’euros du même conseil général sur la durée 30 ans ;
  • 8 millions d’euros de la part du SyTRAL que le conseil général remboursera sur factures ;
  • une utilisation de l’infrastructure de T3 construite, entretenue et exploitée par le SyTRAL au coût marginal d’exploitation.

Rien qu’en se limitant aux chiffes certains, on arrive au total respectable de 181,3 millions d’euros de financements publics pour LESLYS. Ce qui, en prenant l’hypothèse de 4 000 passagers par jour en moyenne sur la durée de la concession, abouti à une subvention de 4,14 euros par passager. Cela représentera un tiers des recettes de Rhônexpress, si le prix du billet est fixé à 12 euros, comme cela a été annoncé… Et si l’on prend en compte l’utilisation des infrastructures de T3 à un prix extrêmement avantageux, on peut parier que la subvention réelle sera aux alentours de 4,75 euros par passagers… Ce qui est un ratio particulièrement élevé. (Par comparaison, si on fait un calcul de ratio uniquement pour la ligne T3, sans LESLYS, qui a coûté 172 millions d’euros, avec une base de 20 000 passagers par jours pendant 30 ans, on abouti à un ratio de subvention pour la construction de 0,79 euro par passager.)

Certes, le département du Rhône n’a pas forcément fait une mauvaise affaire, car globalement, si tout se passe bien, ce qu’il aura payé correspond à l’équivalent d’un prêt à taux fixe d’un peu plus de 3% sur 30 ans pour les 110 millions de la construction. Il n’en reste pas moins que cette infrastructure est finalement très coûteuse par rapport à son utilisation, car ce sera la ligne ferroviaire la moins fréquentée de l’agglomération. Après, on peut juger que le prestige de l’agglomération est a ce prix, mais n’est-ce pas trop cher payé alors que les besoins de capacité sur les lignes de transport surchargés de l’agglomération deviennent chaque jour plus criants et que les moyens financiers pour y répondre semblent insuffisants…

Édition du 19 février 2009 : Corrections d’informations erronées sur la répartition des coûts.

Les données utilisées pour cet article sont tirées des sites web du conseil général du Rhône, et du SyTRAL.