Publié le 05-07-2009 à 22h24
Alors que le réseau de métro a été entièrement mis sous contrôle d’accès il y a un peu plus d’un an, la question de la pertinence de cet équipement coûteux reste posée.
Tout d’abord, si cet équipement a eu quelques effets sur la fraude, on ne peut pas dire qu’elle ait été éradiqué. Il suffit d’écouter et d’observer pendant quelques minutes le fonctionnement des portillons pour voir qu’ils sont très perméables. Des traces de pieds et de mains à grande hauteur indiquent que certains sont tentés par l’alpinisme, mais ce sont là des joueurs, car des techniques bien plus simples et beaucoup moins fatigantes existent. Il faut dire qu’on est bien loin de l’efficacité des portillons que la RATP a installé à la fin des années 1970 (à Châtelet-les-Halles par exemple) qui appliquent une force de fermeture conséquente décourageant efficacement la création de « trains » de fraudeurs. Certes, ils sont moins « sexy » que ceux installés à Lyon, mais ils semblent bien plus aptes à remplir le rôle qui leur est assigné. Et ce ne sont pas les bips affolés des portillons lyonnais qui se font violenter qui semblent faire peur aux contrevenants. Cela en est d’ailleurs venu à un point que le réseau mobilise du personnel massivement dans les stations importantes à certaines heures pour contrôler les validations au niveau des portillons… Pour un peu, on installerait des guérites de poinçonneurs…
Et je ne parle même pas des portes uniquement réservées à la sortie, transparentes, alors que la RATP avait privilégié le plus souvent des portes opaques (on se demande bien pourquoi, d’ailleurs… Peut-être pour qu’une personne à l’intérieur puisse plus difficilement synchroniser ses actions avec une personne à l’extérieur pour la faire rentrer ?…)
Un autre défaut des portillons lyonnais tient à leur carrossage avec une surface parfaitement plane et horizontale sur le dessus… Idéale pour poser son sac à main, ou s’en servir comme tablette pour prendre des notes, voir de siège. Bref, un endroit où les malappris de tous poils peuvent exprimer tous leurs talents pour ralentir ou bloquer les gens qui veulent passer. Là encore, les multiples exemples français et étrangers de surfaces inclinées et de formes tourmentées ont été négligés au profit d’un design inadapté.
Plus grave, les portillons en eux-mêmes n’offrent pas une résistance suffisante à la casse. Un coup violent dans un vantail fait littéralement exploser la vitre et projette des éclats dans toutes les directions. Ceci représente un vrai danger pour les personnes qui attendent ou se déplacent à proximité (événement vécu). On peut même se demander dans quelle mesure une personne blessée par un éclat de verre ne pourrait pas engager juridiquement la responsabilité du propriétaire des installations pour mise en danger de la vie d’autrui…
Enfin, le dernier défaut est la réduction globale de la capacité des entrées et sorties du métro. Dans bon nombre de stations, le manque de place se ressent avec soit des entrés, soit des sorties relativement sous-dimensionnée. D’autant qu’il n’existe pas de portillons « commutable ». Les capacités en entrée et sortie ne peuvent donc pas être modulées en fonction des besoins au cours de la journée. Il serait pourtant facile de programmer cette possibilité, en particulier dans les stations les plus éloignées du centre, où les flux sont essentiellement entrants le matin et sortants le soir. Cette adaptation est d’autant plus nécessaire pour les cas de dysfonctionnement où une rame surchargée peut déverser un flot très important de voyageurs sur le quai. La sécurité de tous impose alors que la station soit vidée des voyageurs sortants le plus rapidement possible. Il est facile de comprendre que dans ce cas, un accès avec par exemple 3 portillons doit en avoir 2 orientés dans le sens de la sortie.
Bref, les portillons ont été installés, la fraude a un peu diminué. Néanmoins il reste à améliorer à la sécurité des voyageurs en renforçant les structures des portillons, en améliorant leur gestion, mais aussi en envisageant la pose de portes palières en bordure de quais. En effet, certaines stations ont des accès insuffisants par rapport à leur fréquentation, situation encore aggravée par les portillons. Une rame peut donc partir alors qu’une partie du quai est encore occupée, parfois à proximité immédiate de la voie, de personnes quittant la station. Le cas de Charpennes – Charles Hernu sur la ligne A en direction de Perrache en pointe du matin devient préoccupant De même que celui de Part-Dieu – Gare SNCF en direction de Charpennes – Charles Hernu en pointe du soir. Alors certes à Lyon, certains décideurs considèrent que les portes palières porteraient atteinte à l’esthétique des stations. Est-il utile pour des raisons d’esthétique de prendre le risque, chaque jour croissant, que des gens soient happés par des rames ?
L’installation de portes palières aurait aussi un effet immédiat sur les suicides… accidents de personnes, mais aussi sur l’amélioration de la régularité des trains, avec une quasi-impossibilité de retenir une rame en bloquant la fermeture des portes. Elles permettraient aussi aux rames de rentrer et de sortir et plus vite de station, ce qui est aussi bon pour l’augmentation de la capacité de transport. Ce n’est certainement pas par hasard que certains réseaux de métro pilotés manuellement ont équipé ou vont équiper leurs stations les plus fréquentées de portes palière. (Par exemple : stations Mayakovskaya, Gostiny dvor, Lomonosovskaya, Ploshchad Alexandra Nevskogo… du métro de Saint-Pétersbourg – Russie, les métros de Yokohama et Kyôto – Japon… Et bientôt certaines stations de la ligne 13 du métro parisien).
Ce sont en tout cas des pistes à méditer en amont de l’évolution vers le pilotage automatique intégral de la ligne B (et éventuellement de la ligne A) du métro. Au risque, dans le cas contraire d’avoir des situations particulièrement dangereuses à gérer avec l’augmentation prévisible du nombre de passagers.
Afin de couper court à toute éventuelle polémique sur la divulgation d’information soit-disant confidentielles sur l’usage déviant des portillons, veuillez noter que cet éditorial et les idées qui sont développées sont uniquement basés sur les observations d’un utilisateur régulier du réseau de métro de Lyon, que tout voyageur est en mesure de faire, le plus souvent en attendant quelques minutes sur un quai.