Publié le 22-05-2013 à 19h17
Du 15 avril au 24 mai 2013, le SyTRAL mène une concertation sur la « Création de voies à double sens réservées à la circulation de la ligne de trolleybus C3 ». Ce projet, écarte à priori toute autre solution que celle présentée. Ceci sans aucun débat. Or les difficultés de la ligne C3 ont des causes multiples qu’il convient d’analyser dans toutes leurs dimensions pour pouvoir envisager une solution pérenne pour cette ligne. Voici la contribution de Ferro-Lyon.net déposée sur le registre en mairie de Villeurbanne :
Généralités sur le projet
Tout d’abord, même si le dossier présenté au public le rappelle, il me semble important de souligner que le ligne C3 est, de très loin, la ligne de (trolley)bus la plus fréquentée du réseau. Cette ligne connaît aussi des dysfonctionnements majeurs. Le dossier reste cependant très limité, voir simpliste sur l’analyse de ces dysfonctionnements. Il pointe uniquement en page 12 ceux liés à l’insertion dans une circulation dense avec des conflits d’usage de la voirie. Cependant, le fonctionnement de cette ligne n’est correct à aucun moment de la journée. Ainsi, dès avant 7h, le matin, on peut constater l’existence de « trains de bus », alors que la circulation automobile est encore très faible, et que le service de la ligne a commencé peu de temps auparavant. On pourrait donc penser qu’à ces heures, où aucun retard n’est encore accumulé, la circulation fluide et les livraisons aux magasins le long du parcours n’ont pas encore commencé le fonctionnement devrait être régulier. Or ce n’est pas le cas… Pourquoi ?
Si le diagnostic n’examine pas toutes les causes de dysfonctionnement, il n’est alors pas sérieux de choisir une solution, car celle-ci risque de ne pas régler toutes les causes.
Or à partir de la page 16, c’est déjà la présentation de LA solution technique : la création d’un couloir de bus, et il est expliqué page 17 que cette solution permettra de transporter dans de bonnes conditions 32% de passagers en plus en 2030, c’est à dire 72 500. Cela interroge. En effet, en 1997, le SyTRAL a décidé de remplacer la ligne de bus 26, qui transportait largement moins de passagers que l’actuelle ligne C3, par un tramway. Il s’agit de l’actuelle ligne T1. Cette transformation au conduit à une hausse de trafic particulièrement marquée puisque cette ligne transporte actuellement de 80 000 à 100 000 voyageurs par jour dans des conditions parfois moyennes. Il ne semble donc pas possible qu’une ligne de trolleybus (véhicules moins capacitaires que les tramways) puisse assurer, sans même parler des conditions, le transport de 72 500 passagers par jour en 2030… Ce qui veut dire qu’avant cette échéance il faudrait remettre en cause l’investissement qu’envisage le SyTRAL. De 2018 à 2030, il y a 12 ans. Le SyTRAL doit-il dépenser 50 millions pour une solution caduque en une dizaine d’année ?
Compte tenu de ces éléments, il semble indispensable, avant de faire un choix technique, d’évaluer quel serait l’impact sur la fréquentation de la ligne de sa conversion au tramway.
Cette analyse est d’autant plus nécessaire que Lyon connaît une difficulté particulière issue de l’histoire des transports en commun : la déficience de la liaison entre la Presqu’Île et la Part-Dieu. Or la partie centrale de la Presqu’Île est en perte d’attractivité commercial et économique depuis des décennies (départ des Galeries Lafayette, des Halles, échec de la revitalisation commerciale du secteur Grolée, départ d’entreprises comme la Banque de France…) Il est probable que l’absence de lien en transports en commun direct et performant avec la Part-Dieu contribue à ce déclin et l’accélère.
En outre, les arguments contenus dans le dossier pour écarter le choix du tramway ne sont pas calculés correctement. En effet, pour estimer le coût de celui-ci, il impute les coûts du matériel roulant, alors que pour le couloir de bus ce n’est pas le cas. Or en 2018, les Cristalis™ de la ligne C3 auront 16 ans pour les plus anciens. La question de leur remplacement commencera alors à se poser, car compte tenu de la dureté du service assuré, il n’est guère envisageable de les faire durer au-delà de 20 ans… Ce qui implique leur réforme en 2022-2023. Pour comparer le coût du couloir de bus par rapport à celui de la conversion au tramway, il convient donc d’intégrer le renouvellement des environ 30 nouveaux trolleybus nécessaires. Le SyTRAL ayant payé ses derniers Cristalis™ 1,2 millions d’euro pièce, il convient donc de rajouter au coût du site propre environ 36 millions.
De plus, ce ne sont là que des coûts d’investissement. Or la comparaison des coûts entre la solution couloir de bus et la solution tramway doit se faire sur les coûts de possession. C’est-à-dire, non seulement les dépenses de construction, mais aussi les coûts d’exploitation et de maintenance. Or il est démontré qu’à capacité de transport équivalente, sur des lignes très fréquentées, les coûts d’exploitation d’un tramway sont plus faibles que ceux d’un trolleybus. Ne serait-ce que par la capacité : un tram a une capacité d’emport équivalente à deux trolleybus. Il est donc possible de transporter le même nombre de personnes avec une fréquence de passage divisée de moitié. À trafic équivalent, il y a donc besoin d’un parc de matériel roulant moins nombreux. Le matériel roulant de tramway a aussi une durée de vie de 40 ans, contre 20 ans pour un trolleybus de construction bas de gamme type Cristalis™ (le prix de ce matériel est lui plutôt très haut de gamme). L’ensemble de ces éléments une fois intégré ne permet pas d’assurer que le couloir de bus est bien moins coûteux qu’un tramway sur l’axe C3 pour la collectivité en général, et la comptabilité du SyTRAL en particulier.
Bref, en l’état, le dossier semble particulièrement incomplet et laisse l’impression que l’on a choisi la solution technique, avant d’avoir défini l’ensemble des causes de dysfonctionnement. Ceci sans chercher à savoir si cette solution est à même de les résoudre. Cette solution a donc toutes les chances de ne pas avoir l’effet souhaité.
Il convient de reprendre complètement le dossier en analysant toutes les causes de dysfonctionnements de la ligne, ce qui permettra d’envisager plusieurs solutions techniques, et de choisir la plus appropriée.
Point particulier de vigilance
Le cours Lafayette comporte deux sections bordées de platanes (entre Thiers – Lafayette et Villeurbanne, et entre Garibaldi – Lafayette et Part-Dieu – Jules-Favre). Ces arbres de grande taille participent à la qualité urbaine des espaces du cours. Aussi, il semble absolument indispensable qu’un aménagement, quel qu’il soit, les prenne en compte et n’y porte pas atteinte.
Améliorations urgentes à apporter
Les dysfonctionnements récurrents et majeurs de C3 ne peuvent rester des années (le dossier annonce 2018, soit 5 ans, tout de même !) sans réponses concrètes, car ils provoquent la gêne et la souffrance de dizaines de milliers d’usagers chaque jour. Le SyTRAL ne peut rester les bras croisés au nom de l’attente d’une hypothétique solution globale.
Les dysfonctionnements se propagent en chaîne car la ligne est très longue et elle doit assurer des missions contradictoires : Le rabattement rapide et efficace de Vaulx-en-Velin sur le métro, et le cabotage dans Lyon et Villeurbanne.
Pour qu’elle puisse assurer rapidement ses missions de manière efficace, il semble indispensable d’envisager une scission de cette ligne avec par exemple trois missions indépendantes qui pourraient être 1° Vaulx La Grappinière à Part-Dieu ; 2° Laurent-Bonnevay à Cordeliers ; 3° Part-Dieu à Gare Saint-Paul. Ces trois « arcs » relativement courts permettraient de fiabiliser les fréquences, tout en assurant une offre renforcée sur la section centrale la plus chargée de la ligne. Il pourrait même y être ajouté quelques services partiels entre Laurent-Bonnevay et Vaulx La Grappinière pour assurer une desserte fiable, efficace et performante de Vaulx-en-Velin.
De plus, une régulation renforcée avec du personnel strictement dédié au sein du PC bus et sur le terrain, pourrait être dès à présent mise en place afin d’améliorer la régularité du carrousel de la ligne.
Ces quelques mesures simples et de coût somme tout modique par rapport à l’enjeu pourraient être mises en place très rapidement (en quelques semaines pour la régulation, et en quelques mois pour la scission de la ligne) et soulageraient son fonctionnement dans l’attente d’une solution pérenne et efficace.
Remarques annexes sur la procédure de concertation
Le SyTRAL, ou au moins certains de ses dirigeants, ne semble pas avoir compris l’utilité et la nécessité d’avoir une concertation de qualité avec les citoyens. La concertation ne peut être constructive que si la structure qui l’organise fait preuve d’ouverture au dialogue. Les réunions organisées dans le cadre de la concertation, même si plus de 200 personnes y assistent, ne peuvent pas donner de résultat lorsque certain représentant à la tribune ne semblent pas respecter leur auditoire et quitte la salle moins de 30 minutes après que le public ait commencé à s’exprimer. Ceci alors qu’une personne parlait encore au micro. L’expression se faisait dans le calme, mais ce départ ne pouvait que causer une bronca.
Il est d’ailleurs extrêmement surprenant que lors de cette réunion qui a été organisée à Villeurbanne le 14 mai 2013, il n’y ait pas eu à la tribune un représentant de la mairie centrale de Lyon, ni un de la ville de Vaulx-en-Velin… J’espère que ces villes, intéressées au premier chef par ce projet avaient été invitées… Et le public présent en nombre aurait été fortement intéressé de connaître leur position sur ce projet, puisqu’il semble que le SyTRAL ait absolument besoin de leur accord.